Les frangins se sourient, elle un peu plus franchement que lui. Parce qu’il a toujours cette chaleur anxieuse qui marbre son buste comme des taches de peinture informes quand il est sur le point d’avoir face à lui la Venus des réseaux sociaux. Il tire sur le col roulé qui enserre sa gorge comme une main un peu trop ferme quand enfin il entend la porte du bar s’ouvrir et se refermer sur le duo improbable : Eze et Iseul. « On a déjà commandé pour vous. » Verre de vin pour lui et Ellin, eau pétillante pour Iseul et jus d’orange pour Ezechiel. « Ellin était en train de me dire qu’elle ne connaissait pas beaucoup Iseul, peut-être qu’un truth or dare ça pourrait être un moyen sympa pour apprendre à se connaitre ? » Pour éviter de les laisser trop réfléchir à un moyen de se dérober, Eli s’éclaircit la voix en faisant mine de chercher une question qu’il a pourtant eu le temps de se poser tout l’après-midi. « Iseul, gage ou vérité ? » Elle choisit ce qui l’arrange. Maître de ses émotions ou du moins en apparence, il donne un ton nonchalant à sa question. « Est-ce que tu te verrais avec Ez ? » Sa bouche et sa tête sont désaccordées comme une guitare qu’on aurait trop sollicitée, une corde a sauté et sa question d’origine qui n’avait rien à voir avec celle-ci a surgi là. Et maintenant il doit vivre avec l’embarras des trois regards qui dardent une expression indéchiffrable sur tout son être qui feint d’être amusé par un jeu qui ne l’amuse plus du tout.

Sa présence ici est encore un mystère. Surtout pour elle. Ellin elle se répète qu'elle fait ça pour lui mais juste pour ce soir. Pas un de plus, faut pas trop lui en demander non plus. Elle veut bien être sympa Ellin mais comme on dit, chassez le naturel et il revient au galop. Et dans son cas, le cheval, il serait capable de battre Vin Diesel dans Fast & Furious. Mais elle le fait pour Elliot, juste pour lui. Elle a sorti son meilleur sourire, les mantras dictés par Emma y'a une demie heure au téléphone tourne en boucle dans sa tête. Ellin inspire, expire pour calmer le furieux qui tape, enfermé sous ses côtes, le bercer et l'endormir jusqu'à ce que minuit sonne et qu'elle puisse enfin redevenir ce qu'elle est - et surtout appeler Emma pour lui raconter la soirée.

Dans son verre, elle fait tournoyer le liquide carmin alors que la voix d’Eli s’élève à l’extérieur de sa bulle ; l’heure du premier acte. Mais Elliot est à deux doigts de la faire sortir de son rôle quand il la bouscule sur le devant de la scène. Le regard à l’affut, elle darde ses orbes onyx dans celle de son voisin. « J’ai dit que ce serait l’occasion d’apprendre à TOUS se connaitre, n’est ce pas Elliot ? ». Ses pulpes se faufilant sous la table pour aller pincer la peau tendre du bras du garçon.
J’suis là comme alliée alors me fait pas sauter.

La question bazardée dans le brouhaha du bar, son intérêt totalement vissé par leurs nouveaux « amis » assis à leur table. Et elle sait pas trop ce qu’elle attend Ellin, une confession ? Un petit potin croustillant ? Ou de quoi faire enfin ouvrir les yeux à son grand dadais de « frère ». Alors en attendant que l’un d’eux mettre fin au suspense, Ellin s’occupe avec une grande goulée de vin. « Bah alors, vous avez perdu votre langue ? ». Attendre oui, mais attendre façon Ellin.

l'invitation lancée tels de jolis confettis, paillettes brillantes dans leurs vies ; en quelques messages, les voilà tous les quatre réunis ! ((en retard)) prévisible — parce qu'ézéchiel a attendu sagement qu'iseul de brume s'apprête alors que lui n'est pas de ceux à se prendre la tête. sweat à capuche jaune soleil, il a l'astre aussi dans son sourire lorsqu'ils pénètrent dans le bar déjà bondé où s'entrelacent les conversations des habitués. ambiance tamisée ; collision des boissons plus ou moins alcoolisées.

ça l'amuse !
l'idée de l'action ou vérité.
ça dessine une risette sur ses lèvres gercées.
ça l'amuse moins en revanche à la question posée.

((oh elliot)) — il manque presque de s'étouffer, saisit d'un geste furtif son verre pour y masquer son air troublé, espérant noyer sa gêne dans le jus d'orange pressé. s'ils savaient. même si c'est du passé, même si c'est un probable raté dans leur fusionnelle amitié, iseul et ézéchiel ne peuvent prétendre ne pas avoir essayé. le temps d'une agréable saison, sans réelle raison — quelques mois,
juste quelques mois perdus.
perdu, comme iseul face à la question.
chevalier d'autrefois, refusant de la laisser trouver seule une subtile échappée, petit prince repose son verre et annonce d'un ton solennel et d'une voix qu'il espère certaine un ah mais on vous l'avait pas dit ? on a été fiancés dès nos dix ans par nos familles respectives. clin d’œil à sa ((prétendue)) compagne, lippes amusées. mais iseul a fait un caprice quand je lui ai cassé sa barrette en sixième. la barrette, c'est vrai ; il entend encore les petits pieds tapés sur le sol du parquet et il aperçoit toujours le rouge carmin de colère sur ses joues porcelaine. du coup tout a été annulé. ((moue faussement triste))

il se voit bien avec isy, ézé ;
mais en toute amitié.

Le rouge posé sur ses lèvres, elle passe devant Ezechiel en lâchant cette remarque indécente, la même après des années «  Bon alors, on y va ? Je t'attends. ». Si on regarde son sourire en coin, on voit se transformer la remarque désobligeante en une taquinerie purement enfantine. Le garçon ne répond même pas, la rattrape jusqu'à la voiture avant de prendre la route jusqu'au bar.

Assis autour de la table, la princesse des temps modernes s'est subtilement faufilée avant son meilleur ami pour avoir la place en face d'Elliot, lui laissant celle devant la mégère "soeur" du jeune homme. Sourire aux nuances acryliques, elle remercie la clique pour la boisson et laisse les bulles chatouiller le fond de sa gorge. Quand, prise de court par la question de l'étudiant, elle s'étouffe légèrement. Surprise, elle tapote légèrement son décolleté, vaine tentative pour retrouver une respiration non obstruée par la gorgée mal passée. Iseul laisse le garçon-enfant déblatérer une part de leur vérité, non sans lui jeter un regard noir pour la barrette ; jamais elle ne lui pardonnera. Après s'être éclaircie la gorge, elle prend enfin la parole «  C'est presque ça ! » petit rire coquet avant de continuer «  On est sortis ensemble au lycée. Quelques mois. On s'est vite rendus compte qu'on était pas compatibles, pas comme ça, lui et moi. ». Elle laisse planer le silence quelques secondes en s'accrochant au regard d'Elliot, bientôt fusionné avec sa chaise. Sourire sincère, trésor de grands mystères «  Donc non. Je ne me vois pas dans une relation avec Eze. Pas lui. » pied lancé sous la table pour rencontrer la cheville du jeune Duval quand soudain, son téléphone sonne. Maman. Ses traits redeviennent sérieux, la joie environnante brisée par ce substantif sur son écran éclairé. «  Je reviens. Eze prend mon tour ! » qu'elle dit avant de s'échapper en dehors du bar.

Ellin darde sur lui ses onyx fraichement sortis des braises, les étincelles de feu l’éclaboussent comme un avertissement. Il soutient son regard en y laissant transparaître son besoin de l’avoir à ses côtés et elle se radoucit malgré la vive brûlure qu’elle inflige à son avant-bras. Avant que le sien n’aille rejoindre le long de son corps, Elliot l’attrape pour y exercer une douce pression, un merci tacite qu’elle saura interpréter. Elle ne fait pas le mouvement de se soustraire à ce contact alors il garde ses phalanges contre sa peau. Sa palette d’émotions lui est lisible au toucher à présent, elle peut percevoir le léger relâchement à la blague d’Ezé qui a réussi à sauver la situation avec humour. Iseul ponctue la blague d’une vérité, oui ils sont déjà sortis ensemble. Son regard dévie sur son ami qui a à l’évidence oublié ce « petit » détail. Maintenant les souvenirs qu’il a partagés avec lui sur le pont des arts sont altérés. Il lui a caché une partie de la vérité, pourquoi ?
« Donc non. Je ne me vois pas dans une relation avec Eze. Pas lui. » Le train de ses pensées déraille, d’abord il doit faire de la place à ce sous-entendu mais ensuite et surtout, à l’information que son talon haut a envoyé à son corps en remontant le long de sa cheville. La surprise de cette action se décharge sur le poignet d’Ellin qu’il broie avant de lâcher en se confondant en excuses. L’attention rivée sur Iseul qui quitte la table et ça, jusqu’à ce qu’elle sorte de son champ de vision.
Ils se retrouvent désormais rien que tous les trois avec une ouverture pour interroger Ezéchiel sur le fait d’avoir gardé secret son ancienne relation amoureuse avec sa meilleure amie. Il pourrait demander oui, mais quel genre de réponse pourrait-il lui donner ? « je l’aime encore alors j’ai préféré ne rien te dire » ou ça lui ait simplement sorti de la tête ? Mais comment une telle chose, surtout vis-à-vis de lui, peut-elle lui échapper ?
En sentant le malaise dans la façon que le garçon-enfant à de se tenir, il préfère oublier qu’il n’a pas été honnête avec lui ou du moins essayer. « Je t’ai fait mal ? Encore désolé, je me suis pris le pied de la table dans le genou. » Qu’il justifie avec dans la rétine une sincérité masquée. Lui aussi est doué à l’art du mensonge, jusqu'à semer le doute en Ellin. Ça le fait culpabiliser, se trahir et voilà sa couverture ne tient plus.

Elle sait pas trop à quoi elle s’attendait Ellin, se doutait probablement pas des confessions qui allaient se faire ce soir. Yeux qui deviennent soucoupe, la bouche se tort dans un « o » muet qu’elle s’empresse de cacher derrière son verre de vin, distrayant ses lèves du goût acre pour les empêcher de trahir l’émotion qui la traverse réellement. « Donc non. Je ne me vois pas dans une relation avec Eze. Pas lui. ». Grimace qui cette fois, traduit sa sympathie pour le garçon qui s’enfonce un peu plus sur son siège. Ça doit faire mal malgré les années qu’ils semblent avoir passé tous les deux. Ça fait mal d’être simplement réduit à lui. Et à la frangine. Ellin elle peut que compatir, faisant glisser discrètement le pot de cacahuètes vers son collègue. Elle lui aurait bien offert un coup à boire s’il s’était pas cantonné au jus d’orange. Alors Ellin, elle trinque pour deux, les deux chandelles qui crament sur le côté en laissant la cire coulée sur le bois de la table.

Et puis comme si Elliot s’était souvenue qu’elle était là, sa main broie la sienne, son verre dodelinant de l’autre côté, des gouttes carmin étalés sur son pantalon. « Elliot qu’est-ce tu fous ?! ». Mais son frère est perdu ailleurs, les pupilles plongés dans le vide laissée par la donzelle. « Je t’ai fait mal ? Encore désolé, je me suis pris le pied de la table dans le genou. – Nan c’est bon » qu’elle siffle les mâchoires serrées, le calme qui l’animait, désormais oublié. « J’reviens » et sans un autre mot, s’échappe dans les toilettes. Elle sait qu’elle arrivera pas à retirer la tâche, « c’est trop tard » qu’elle se dit Ellin en soupirant et grognant contre son reflet. Les conseils à nouveau répétés pour se donner le courage d’y retourner et là voilà qui revient à la tablée. « Ez, action ou vérité ? » sans laisser le temps de demander où elle est allée, Ellin reprend la main. « Vérité ? Ok … du coup vu qu'Iseul est out, parmi tes  potes, avec qui tu te verrais en couple ? ». Et Ellin, elle a le sourire malin, le sourire taquin. En espérant entendre ce prénom au bout de ses lèvres.

le regard noir pour la barrette brisée qui se mélange aux iris malicieuses alors qu'elle énonce la vérité ! iseul est transparente ((eau claire scintillante)) ses lèvres parées de ce carmin tant apprécié avouent sans détour leur relation d'un été.
quelques mots,
un silence sans écho.
((reprise)) d'une respiration qu'il ne pensait pas retenue ; ézéchiel esquisse un sourire, glisse un subtil t'es déjà bien assez compliquée en pote. aux fragrances d'insolence avant qu'elle ne s’éclipse de la table pour attraper l'appel émis de son portable. les voilà tous les trois, suite à cette confession lancée en grand éclat.

ce n'est pas qu'ézé ait voulu le cacher,
c'est simplement qu'il se doute bien,
que ces nouvelles ne sont jamais fort appréciées.
((vous savez)) les deux meilleurs amis qui ont franchit la barrière de l'amitié. car il sait ô combien tout cela instaure un malaise, des sous-entendus ; l'enfant rêveur est bien incapable de gérer tout ces bruits qu'il trouve superflu.

jeu de verre,
le rouge qui dérape sur le tissu,
ellin qui disparaît de leur vue. gamin maladroit hésite à engager un dialogue, se racle la gorge et s'apprête à ajouter quelque chose mais la tornade revient pour souffler de son vent orageux la fameuse question, à laquelle il a à peine le temps de répondre ; elle s'empresse de saisir un vérité !

il éclate de rire, littéralement — avant de prendre un air faussement sérieux, effaçant de son esprit le nom ((véridique)) qui lui est venu. ça tombe bien j'savais pas comment l'annoncer... ellin, j'pense qu'on est fait pour être ensemble. les risettes malicieuses, les demi-lunes amusées ; et il enchaîne, parce qu'il n'aime pas mentir mais qu'il ne peut pas dire la vérité ((le nom lointain au goût du regret)) peut-être aussi parce que la notion de couple, ça lui échappe ; ça l'angoisse — c'est trop fugace dans son espace.
ok, pour vous deux— action. ah oui déso, c'est la règle dumas, au bout de deux vérités, on passe à une action ! il clame son invention, levant l'index comme pour arrêter toute opposition. montrez-moi les habitudes gênantes de votre famille aux repas de famille genre— noël par exemple ! c'est dans pas longtemps.

envolées ! les questions sur les sentiments privés ; ézéchiel se sent bien plus libre lorsqu'il n'est pas concerné. vous comprenez ; il est terrorisé à l'idée de se dévoiler.

Elliot contrôle assez bien ses émotions en apparence, les rares fois où il laisse filtrer ce qui se passe à l’intérieur c’est que la surprise a été plus forte que lui et c’est le cas maintenant face à un Ezechiel qui essaie de se faufiler hors d’une trappe posée par Ellin qu’Eli lui, compte bien refermer.
Après avoir laissé échapper un rire qu’il a mué en toux, l’influenceur bascule son corps en avant vers son ami, avant-bras posés sur la table en jouant avec une tension façonnée d’une voix mutine presque suave. « Ellin et toi ? Moi je voudrais qu’on s’y attarde à défaut d’autre chose. » Taquin dans le ton seulement, Eze aurait dû saisir l’opportunité de poser deux ou trois mots sur ce qui a été révélé lorsque sa soeur les a quitté pour éponger sa maladresse mais il ne l’a pas fait alors maintenant il paie. « Tu as tes règles mais nous on a les nôtres et le mensonge n’est par permis alors soit tu développes ta réponse soit tu la changes. » Il finit son verre de vin d’une traite, hardiesse liquide qui entre dans la partie comme un joker insoupçonné.