père : Gabriel Maurin, 49 ans, chef d'orchestre au Philharmonique de Vienne, enseignant au Conservatoire de Paris. Difficile d'assumer son rôle de père dans un autre pays alors il est revenu habiter en France pour se rapprocher de sa fille il y a six ans. Ellin passe un weekend sur deux chez lui mais elle n'aime plus trop y mettre les pieds depuis qu'il vit avec sa nouvelle compagne.

mère"s" : Hwang Min Joo, 41 ans, divorcée depuis 18 ans. Avait quitté sa Corée natale pour suivre son futur ex-mari. Anciennement cheffe de projet chez Samsung, est devenue wedding planneuse et possède sa propre boîte. Consacre sa vie à l'éducation de sa fille et garde des relations cordiales avec le père d'Ellin. En froid avec sa famille depuis qu'elle est partie.
Puis il y a Aurore la meilleure amie de sa mère qu'elle considère comme une seconde mère. Un peu plus facile de parler des garçons avec elle qu'avec sa propre génitrice, un autre pilier sur lequel elle peut se reposer sans avoir peur.

frère(s)/soeur(s) : fille unique, maman n'a eu qu'elle et espère que papa n'en aura pas d'autres. mais y'a Eliott. on les a élevé comme des frères et sœurs et Ellin, ça lui allait. enfin ça c'était au début. Si elle pouvait se défaire de cette entrave fraternelle, peut-être que tout aurait été différent.


école fréquentée : ellin mauvaise élève, ellin au carnet raturé de rouge, aux livres cornés et jetés au pied du lit ; on a pensé à l'inscrire dans le privé en espérant voir ses notes remonter mais le public, y'avait que là où elle pouvait aller (où il était).
diplôme(s) : pas le brevet, le bac avec justesse après des nuits blanches enchaînées la semaine juste avant, ellin a toujours eu du mal à se lover dans le moule de l'élève modèle, au plus grand désarroi de ses parents. à l'université, ellin s'est révélé comme l'une des plus prometteuses de sa promo.
situation actuelle : étudiante en quatrième année, on misait pas beaucoup sur sa ténacité, on pensait même qu'elle finirait par abandonner. mais ellin elle s'est accrochée et se découvre même un intérêt à étudier.
langue(s) parlée(s) : français, coréen (langues maternelles), anglais (couramment), allemand (notions de base).


cigarettes : fumeuse occasionnelle au lycée, à laisser tomber la nicotine.
alcool : petite buveuse, regrette toujours vite ce troisième verre qui lui est toujours fatal. a l'alcool joyeux et affectif.
drogues douces : un bad trip a mis rapidement fin à sa consommation de joint, n'aime pas la sensation que ça lui procure.
drogues dures : ni a jamais touché et ni touchera probablement jamais.

télévision : très peu d'heures, seulement quand sa mère l'appelle pour regarder the voice ou danse avec les stars.
ordinateur : pour les études ou pour les petits secrets, ellin passe un peu trop de temps devant son ordi ; papa a eu la bonne idée de lui filer son compte netflix et ses insomnies lui en sont reconnaissantes. les puits sombres sous ses yeux, un peu moins.
téléphone portable : appeler et envoyer des messages, c'est ce pourquoi elle l'utilise. les notifications qui s'accumulent, négligées, pourraient rendre fou n'importe qui un peu accro. elle dégaine le mode avion plus vite que son ombre.
réseaux sociaux : si on se fie à son compte instagram, ellin a disparu depuis plus d'un an. trois d'après twitter. pas des plus actives, elle préfère opérer dans l'ombre, à faire défiler les photos et les infos d'un coup de pouce rapide. elle sait qu'elliot sera toujours ravi de lui faire un compte rendu de l'actualité.

régime : elle a essayé d'en suivre comme toutes les gamines à son âge mais face aux chips ou pizza, ellin n'a pas réellement une volonté de fer. alors elle a arrêté de se priver et n'en a que faire des jugements des autres sur sa silhouette.
maladie(s)/handicap(s) : ellin est asthmatique et c'était sa meilleure excuse pour échapper aux cours de sport. un peu moins drôle quand l'anxiété et les crises d'angoisse s'emmêlaient et chassaient l'air de ses poumons en feu.

the chainsmokers // h o p e.
JORDY // j u s t  f r i e n d s.
the script // b r e a k e v e n.
angèle // l e s  m a t i n s.
bleachers // r o l l e r c o a s t e r.
lorde // g r e e n  l i g h t.

o1. ellin, c’est le genre de gamine qu’on remarque tout de suite. les enseignants soupiraient à son arrivée, en se demandant quelle frasque elle allait commettre aujourd’hui. ce genre de gosse qu’on a beau punir, ils rigolent dans votre dos une fois la remontrance terminée. une enfant qui se noie dans ses émotions et que seule la colère soulage. ça cogne dans sa petite cage thoracique, un jour qu’elle avait dit. alors ellin, elle était de ceux qu’on appelle les « attachiants », aussi intenable soit-elle, y’avait toujours une caresse dans ses cheveux, un sourire complice à la dérobée, un petit rire qui accompagnait le sien. les cas désespérés sont souvent les plus touchants.

o2. ellin, elle a l'habitude de vivre sans papa, elle s'est fait à son absence, à regarder les autres enfants rejoindre leurs parents à la sortie de l'école, à passer ses anniversaires sans lui, chaque bougie supplémentaire comme un voeu futile, envolé avec la fumée. les fois où il revenait, le petit monstre dans son estomac grognait et du haut de ses huit ans, ellin avait déjà la rancune acerbe. pas un sourire ne décollait de ses lèvres, le silence était son meilleur allié. mais quand il s'en allait (encore), ellin pleurait, le cœur serré, abandonnée.

o3. alors ellin, elle a beau jouer les filles détachées, la nonchalance animant ses épaules, qui lui donne cet air de «  je-m'en-foutiste » ; ellin, elle a besoin des autres mais préférait qu'on lui arrache la langue que de l'avouer, plutôt que de vocaliser ses sentiments. alors ça passe par de petites attentions, des gestes anodins qui, dans son langage  maladroit, traduisent des « prends soin de toi » ou des « je serais toujours là pour toi », des « je t'aime » qu'elle prononce furtivement comme si c'était mal de leur dire. prude des sentiments, un raz-de-marée permanent.

o4. ellin, elle a des secrets, comme les gamines de son âge. des petites choses qu'on évite de raconter à tout le monde pour survivre à la jungle collégienne. ellin au regard éclair, à la bouche assassine. l’inapprochable qu'on admire discrètement, gamine à l'échine dressée contre l'injustice. élue déléguée de classe malgré elle, on aimait son air confiant et sa grande gueule. difficile de se la représenter autrement qu'avec des flammes jaillissants de ses orbes noires et sévères. pourtant, y'a la ellin douce, la ellin délicate qui fait virevolter les notes de musiques autour d'elle quand elle ne fait qu'un avec son violon et son archer. une pratique depuis l'école maternelle pour calmer la tempête. ellin s'est révélé patiente, ne rechignant même pas à l'apprentissage du solfège ou aux conseils de son père. elle était apaisée ellin, même heureuse. alors elle a gardé ce petit secret précieusement pour elle. pour ne pas briser sa bulle ni son image de rebelle impétueuse.

o5. et puis un jour, ça lui ait tombé dessus. une grande claque qu'elle a prise en pleine tronche. ça lui a fait mal au début, cherchant à renier, à se convaincre que c'était pas possible, que c'était mal même et qu'on la traiterait comme une pestiférée si on venait à l'apprendre. mais plus elle essayait de l'étouffer, plus elle avait l'impression que tout le monde pouvait le voir écrit en grosses lettres sur son front, sur fond de son visage cramoisi par le sang affluant jusqu'à ses joues.
mais ellin est amoureuse.
ellin est amoureuse d'elliot.
trois ans déjà et elle n'est toujours pas habituée à ce que son palpitant s'affole à son sourire, pas habituée aux picotements dans sa nuque, ses bras, aux fourmillements de ses jambes quand il la frôle, presse sa main dans la sienne des secondes en plus, des secondes qu'elle voudrait voir s'éterniser. mais elliot, on l'a toujours présenté comme un frère, un meilleur ami destiné avant même qu'ils soient nés. et ellin, ça lui allait très bien. au début. c'est bizarre l'amour, c'est nul même. et ça se décide pas non plus. et ça la bouffe ellin, un peu plus chaque jour à ses côtés. chaque jour de réaliser qu'elliot sera à jamais elliot et que pour lui, ellin ne sera jamais qu'une soeur. pas une femme qu'on désire, juste ellin. et pour elle, c'est pas assez.

o6. mais elle a tenté ellin, tenté de l'oublier, d'étouffer son palpitant avec d'autres. des baisers futiles, des promesses vaines qui lui gonflaient le coeur un peu plus pour l'intouchable. elle arrivait plus à se le sortir de la tête, comme une chanson qui tourne en boucle sans qu'on puisse l'arrêter, raisonnant sans prendre garde. ellin a essayé de remplacer la mélodie par d'autres et puis, elle a cru trouver la bonne. gentil, souriant, l'humour un peu bancal. c'était pas l'amour fou mais ellin l'appréciait. elle pensait que ce serait suffisant. suffisant pour l'oublier. quand il l'embrassait, ellin essayait de ne pas penser à ses lèvres, à leur baiser. quand il l'étreignait, elle forçait un sourire, pour se convaincre que c'était ce qu'elle voulait. mais quand leurs corps allaient s'unir, il était tout ce qu'elle voyait, son visage collé à la place de l'autre. alors ellin s'est enfuie, laissant le  garçon dans l'incompréhension. et dans sa fierté mal placée de mâle frustré, il conta une aventure dont ellin ne se souvenait pas, une nuit intense qui avait fait d'elle, la traînée de l'université. mais peut-être que c'était plus supportable de se faire siffler dans les couloirs que d'admettre que même pendant l'amour, ellin ne pensait qu'à lui.  

o7. et parfois, ellin s'en veut de l'aimer. ça aurait été plus facile de continuer à l'appeler son frère -elle ne le fait plus maintenant. plus facile de l'aimer comme ça et pas comme ci. parce que même si leur petite famille est pas parfaite, pas comme celles des autres, ellin elle la chérit si fort qu'elle en a le cœur qui déborde. parfois quand les rires explosent au milieu des cartons de pizza, que les vieux souvenirs s'étalent sur le parquet du salon, elle laisse une courbe distraite s'esquisser sur sa bouche en regardant sa mère et ses fossettes que ces soirées creusent un peu plus au fil du temps ; aurore et ses mèches de cheveux éparpillées autour de son visage alors qu'elle rejette la tête en arrière ; elliot et ses yeux disparaissant derrière des croissants de lune scintillants ; oui elle s'en veut, parce qu'un jour, si leurs « vendredizza » s'arrêtent, ce sera entièrement de sa faute.

o8. mais la confession a failli plusieurs fois lui échapper, charbon ardent dans sa bouche dont elle aimerait se libérer mais qu'elle ravale toujours de peur de l'incendie qu'elle pourrait déclencher. ça lui picote la bouche quand elle retrouve aurore autour d'un café ou quand sa mère feuillette ses catalogues de robes de mariées. elle qui imagine sa fille dans les plus belles dentelles lors du grand jour, la voie si heureuse au bras de son cher et tendre devant l'autel. déjà petite, ellin se cachait entre les jupons, revêtait les voiles en se tenant devant les grands miroirs ; parce que c'était joli, que c'était marrant de faire comme les grandes. aujourd'hui quand sa mère parle de mariage, elin se contente de répondre avec dédain qu'elle a encore le temps d'y penser, sans oser dire qu'elle ne s'y verrait jamais. mais ellin se laisse déguiser, poupée docile juste le temps d'une journée, juste pour maman.

o9. les concours, les récitals, tant de représentations depuis l'âge de six ans qui lui ont donné le goût de la scène ; le goût amer de l'attention, des regards braqués sur elle, des notes affichées sur son front comme une bête de foire. ellin le faisait surtout pour que papa maman soient fières alors elle oubliait l'angoisse, ravalait l'air brûlant avant de se produire; un coup de ventoline pour calmer le boa constrictor dans sa poitrine. mais ellin, aussi étonnant soit-il, aurait préféré rester dans les coulisses. y'a ce truc dans les films, plus que la beauté de certaines images qui l'a toujours transporté, ce pouvoir qu'à la musique d'articuler les émotions encore mieux que les acteurs sur la pellicule. la tension que le mariage des violoncelles et des tambours fait grimper, la gravité du violon qui roule telle des perles salées sur le visage de la dulcinée, la légèreté du piano qui court sur la peau comme les enfants dans la cour de récré. un langage qu'elle veut apprendre lorsque les mots lui font défaut.

1o. alors ellin, c'est un mystère ambulant. mais quand on a la patience de la découvrir, d'aller plus loin que le chapitre six, ellin c'est une gamine  au rire contagieux, qui porte toujours des chaussettes dépareillées, parfois de tailles différentes ; ne sort jamais de chez elle sans avoir appuyé sur l'interrupteur trois fois de suite ; sursautera de peur à la vue d'une sauterelle -traumatisme de ses vacances d'été en corée-, a sa place préférée au cinéma -côté couloir- ; a gardé le premier euro qu'elle a gagné en bossant ; ne finit jamais ses livres ; déteste l'odeur des bougies ; sait parfaitement imité la grenouille ; ne dort jamais les volets fermés ; sait réciter l'alphabet en rotant -talent indispensable- , connait les chansons de Lorie par cœur -ne la mettez jamais au défi- ; dort encore avec sa vieille peluche Simba ; a son permis mais préfère dire qu'elle l'a pas pour se faire conduire ; ne mélange jamais ketchup et mayo ; n'aime pas les tomates chaudes ; a failli s'évanouir après son premier tatouage -mais s'en refera sûrement un autre- ; s'est déjà introduit dans une maison qui n'était pas la sienne ; est pro pour imiter la signature de son père -ne s'est jamais fait prendre- ; vient toujours se réfugier dans le lit d'elliot quand c'est la pleine lune -trauma de jeunesse encore- ; préfère le popcorn salé au sucré ... un mystère ambulant qui cache tout un tas de petits trésors.